Troisiéme jour de chantier…c’est dur. Mais ce soir on n’a pas le moral. On comptait finir et non, et pourtant on ne chôme pas. « Je suis dégoûté, se plaint Quentin », « ça m’a saoulé de ne pas finir. Demain j’attaque à fond, d’entrée je tape dedans, je prends l’échelle en premier et personne ne vient me la piquer. C’est moi qui commence car comme ça l’électricité du couloir sera terminée. »
« Ce que fait Valentin, il y a longtemps que j’aurais pêté les plombs, le tableau c’est du boulot vachement intéressant mais quelle patience ! » fait encore remarquer Quentin
« Cette journée de lundi a été crevante, beaucoup plus chaud que d’habitude. Qu’est ce que l’on a bu !!! J’ai pas compté les bouteilles mais il y en a eu un stock de vidé », remarque Dylan. Le matin on carbure bien, mais l’après-midi c’est chaud, on n’avance pas bien vite et c’est même parfois sagouiné tellement on a du mal à se concentrer. Il faut dire aussi que question matos ce n’est pas l’idéal, il nous faudrait une perceuse avec fil de plus, un marteau de plus, une ou deux échelles de plus or ici pas moyen de trouver quoique ce soit, tout fait défaut. Mr Mekki a fait toutes les boutiques de bricolage du coin et il est revenu bredouille, sauf pour les vis et les petits cavaliers. Alors à moins de faire dans le local, c'est-à-dire utiliser le plat d’une hache comme marteau, monter un échafaudage en bambous, on fait comme on peut. On patiente en faisant un autre boulot en parallèle( dénuder les fils, monter des dominos pour les boites de dérivation…) on est sur la pointe des pieds et les bras tendus.
Heureusement, les profs sont là pour nous reprendre et nous restimuler. « Si tu ne sais pas scier tu prends un guide, et puis les goulottes il faut les ébavurer les gars », combien de fois Mr Mekki nous a répété ça cet après- midi ?», dit Valentin. « Voilà encore un travail à recommencer, cela nous retarde et on le sait, et cela nous agace ». L’après-midi ce n’est pas facile de rester concentré à fond tout le temps, à rester lucide. L’après-midi, c’est mort, on est tous vidé, à partir de 15h30 on commence à peiner dur. On démarrerait bien plus tôt le matin mais comme on n’a pas de transport avant on est sur le chantier à 8heure, et on finit à 18h.
Heureusement que l’on a des visites aussi. Les enfants défilent à longueur de journée sur le chantier, hello, nous disent-ils pour faire remarquer leur présence. Ils se plantent aux fenêtres, les plus hardis s’aventurent dans les pièces en quête d’une aide à nous apporter, genre maintenir une goulotte, tirer un bout de fil, ramasser un outil…ça nous donne du cœur à l’ouvrage.
Demain on y retourne, on va bien dormir et on sera à nouveau frais…Normalement demain c’est fini pour Lataste, il reste le va et vient du couloir à vérifier, les lampes de deux chambres à finaliser, le bâtiment des toilettes à connecter, et on part pour notre deuxième chantier, l’école de Kang Va…Là- bas c’est différent.
Kang Va
L’école est nettement moins dotée que celle de Lataste, deux bâtiments seulement, les classes sont largement plus vétustes, plus anciennes aussi, et le quartier dans lequel elle est implantée est beaucoup plus pauvre. On le voit aux enfants. Ici les enfants sont plus pauvrement habillés, ils sont aussi plus agités, excités qu’à Latastes, ils touchent aux outils, ils touchent à tout, il faut faire attention. Ils n’ont pas tous leur uniforme, et l’encadrement fait défaut : un directeur qui fait aussi l’école, tous les niveaux confondus. Le matin il y a un enseignant qui vient à la place du directeur. Ils ont peu de cours en fait, ils sont moins encadrés. Ce sonr les fonds qui manquent pour faire mieux. On a remarqué qu’ils faisaient beaucoup de récréations. Ils ont beaucoup moins d’équipements qu’à Lataste pour jouer. Les enfants ont très peu de fournitures scolaires, ce qu’on leur a apporté va les combler, on leur donne ce soir.
La nature du travail à effectuer nous parait bien plus simple qu’à Lataste, et puis maintenant on a la main, mais les conditions de travail, elles sont plus pénibles. Les salles de classes sont de véritables étuves, et extrêmement poussiéreuses et sombres. L’électricité est arrivée dans le bureau du directeur , à l’autre bout de la cour, il a fallu que l’on se confectionne une rallonge car ici il n’ y a absolument rien en matériel, pas un marteau, pas un tournevis, quand c’est cassé cela reste cassé, même l’infirmerie fait pitié à voir. Heureusement que Mme Lannegrand a une trousse à pharmacie pour soigner nos coupures.
On a parfois du mal à placer nos goulottes ou à planter nos cavaliers pour maintenir les tubes, il faut choisir nos endroits car le bois est pourri en plusieurs endroits, des morceaux de poutre entiers s’effritent sous les doigts.
Ici on la visite des villageois, ils traversent la cour de l’école pour se rendre dans leur maison collées à l’enceinte de l’école, ils ralentissent à notre hauteur, ils s’arrêtent, nous regardent et s’en vont, tout silencieusement.
Ce matin nous sommes deux groupes, certains sont restés à Lataste avec Mr Mekki, pour vérifier certains branchements qui ne fonctionnaient pas hier lors de la mise en jus des bâtiments, et l’autre groupe est avec Mme Lannegrand. On a chacun notre taf défini, chacun sa salle. « J’ai dit à Amin que je n’allais pas saboter son travail d’hier, alors je m’applique encore plus. Je veux qu’il soit content de ce que j’ai fait dans sa salle. Il peut me faire confiance », explique Quentin. Hier Nicholas a testé sa confiance en lui, c’était la mission que lui avait confié Mr Mekki. Il a été responsable du tableau et aujourd’hui il est tout seul pour s’occuper du bureau du directeur et des toilettes…ça a l’air de fonctionner.
Mme Lannegrand contôle juste que l’on tienne les temps et que ce qui a été prévu de faire se fait. On se retrouve tous à 11h30. Normalement on devrait avoir fini ce chantier ce soir…normalement. On vous dira cela à notre prochain contact.
A bientôt, les cambodgiens de Romorantin
Quentin, Nicholas, Gwendal, Dylan
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http://www.lanouvellerepublique.fr/Loir ... n-2223315#
http://www.lanouvellerepublique.fr/Loir ... ue-2222143
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M.Mekki et Mme Lannegrand ont donné des nouvelles aujourd'hui par téléphone :
des mails sont bien partis mais ne sont pas arrivés jusqu'au lycée : trop de photos pour que le message "passe"; un nouvel envoi sera fait dès que possible.
Les jeunes vont très bien et sont satisfaits de leurs visites comme de leur travail qui avance bien.
Ils se sont bien adaptés aux conditions locales d'hébergement et aucun ne souffre de nostalgie.
La Proviseure
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Lycéens en terre inconnue
Sortie de l’aéroport de Phnom Penh : 35 degrés… et des toucs toucs partout. « C’est quoi ces carioles-mobylettes ? » s’étonne Dylan. Des engins stressants et hyper maniables qui se faufilent dans les rues comme un rien. « Eh bien, on y est » ajoute Dylan.
Une douche à l’hôtel et on y retourne, direction le Palais royal. Nous avons 14 heures de vol dans le corps mais nous sommes portés par l’excitation de la découverte. Nous goûtons à l’ambiance colorée des rues de la capitale et à sa multitude. « C’est fou, ne peut s’ empêcher de constater Valentin, ça bouge de partout, à droite, à gauche, devant, derrière…et tout cela avec un calme impressionnant!! »
Les murs du palais sont devant nous, premier choc visuel: cette architecture orientale est trés sculptée et colorée. Nous entrons dans l’enceinte du palais et face à nous la salle du trône, trés richement décorée, sur la droite de drôles de cônes, les stupas, monuments funéraires immenses qui enferment les cendres des membres de la famille royale ; plus loin un bâtiment attire notre attention, il ressemble à un kiosque. Deuxième choc : un autel avec des boudhas, des bâtonnets d’encens, des offrandes. On s’installe sur les nattes et là, la magie de l’endroit opère, un grand moment de zénitude nous saisit tous. On ne dit plus rien, on écoute le silence et le temps devient palpable. Chacun est centré sur son intérieur… Moment étonnant et déstabilisant, reconnait Nicolas P.
La journée avance dans les lumiéres de la ville. Promenade sur les berges du mythique Mékong. Madame Lannegrand nous évoque Marguerite Duras. Nous regardons passer les fines embarcations poussées par des perchistes. Les eaux du fleuve sont lisses et épaisses. On peut rentrer à l’hôtel, nous sommes repus et rompus.
Le lendemain s’annonce tout aussi chargé culturellement. Première étape et troisième choc : la prison S21, au Coeur de Phnom Penh. Une école transformée en centre de torture par le dictateur Polpot. Nous découvrons un site où les murs et les sols de chaque piéce parlent des humiliations et des atrocités infligées dans cet endroit. L’atmosphére est plombée, dérangeante et nous impose un silence de réflexion. Notre guide nous explique les 20 000 personnes tuées ici, dont sa mère, sa soeur, son frère et son père. Elle, elle a pu aller se réfugier en Thailande, sans se faire prendre par les Khmers rouges. On s’arrête un instant devant le tableau du réglement, il est choquant, éberluant, offusquant. « L’article qui me révolte le plus, dit Valentin c’est : « Pendant la bastonnade ou l’électrochoc, il est interdit de crier fort ». « Moi ce qui me choque, reprend Nicolas, c’est : « Il est interdit de me contester » et « Ne fais pas l’imbécile, tu es l’homme qui s’oppose à la révolution ». « C’est fou ça quand même », conclue t –il.
Avant de quitter les lieux, notre guide nous dirige vers 2 vieux messieurs, les 2 derniers survivants de la prison S21, ils sont revenus sur ce lieu de souffrance pour témoigner de sa réalité. Nous les saluons, émus et avec beaucoup de respect.
Nous laissons la prison derrière nous avec un certain malaise et en même temps avec ce sentiment d’avoir la chance de ne pas avoir connu cette barbarie, cette folie dans notre pays.
Direction le Marché central, une construction du temps où les Francais assuraient un protectorat sur ce pays. Là, quatriéme choc, alimentaire celui-ci. Aprés avoir déambulé dans les boyaux encombrés du marché, après en avoir pris plein les narines et les yeux, nous tombons sur une marchande d’insectes. Vient alors l’heure de vérité: qui va en goûter? « Monsieur Mekki, on en prend? », lance Valentin. « Et bien on y va, c’est parti ». On reluque les tas d’insectes, on laisse de côté les plus gros, cafards, blattes, sauterelles et araignées, les plus gras, vers blancs et rosés. On choisit les plus petits, des grillons et criquets. Monsieur Mekki commence par une patte de mygale, suivi d’un grillon, Gwendal enchaine avec 2 criquets, et ainsi de suite jusqu’à ce que tous ait testé, sauf Amin et Dylan. « Sûrement pas, non! En plus si là- bas ils apprennent que j’en ai mangé, je te dis pas les plaisanteries au retour » avoue Dylan et pour se défendre, il ajoute « Je n’ai pas mangé d’insectes, mais j’ai mangé des grenouilles, des pattes de poulet, le fruit pétales de cobra et cette soupe au goût trés bizarre. Et puis c’est pas dit que d’ici la fin du séjour j’y aille pas aux insectes!
Nous voici déjà le soir et nous avons rendez-vous à l’institut francais, avec son altesse royale, la princesse Sylvia Sisowath. « Nous découvrons une princesse très accessible » fait remarquer Nicolas, « et très contente de notre implication auprés des enfants de son pays ». Elle nous a dit avoir des tas de projets pour nous si nous souhaitons revenir. On ne lui a pas dit non.
Une fin de journée en douceur et encore une fois instructive puisque nous avons assisté à une conférence en anglais sur les jeunes espoirs de la photographie cambodgienne…et nous avons tout compris, à notre grande surprise.
Nous rentrons à l’hôtel, demain il faut se lever tôt.
Nous pensons à vous,
les Romorantinais du Cambodge, Valentin, Dylan, Nicolas, Amin, Andy, Quentin
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Notre avion sur le tarmac. Il s’agit d’un A380 de Malaysia Airlines.

L’accès à la salle du trône, interdit de photographier à l’intérieur.


Des spécialités locales, n’hésitez pas à passer des commandes de cafards, grillons tarentules, vers et insectes non-identifiés. Et en dessert, des grenouilles !!!Bon appétit.
Dylan Fassot. 1Mei
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